29 mai 2017

Portraits de
parisiens

Et Kiraz inventa la parisienne

Quand je le rencontre dans son appartement avec vue plongeante sur Paris, il me dit : « pourquoi n’êtes-vous pas venue plus tôt ?  ». A plus de 90 ans, Kiraz sait toujours parler aux femmes. Il les observe d’ailleurs tendrement, attablé à la terrasse d’un café de Montparnasse. « Je les regarde toutes. Elles ont chacune quelque chose de spéciale » précise le dessinateur. Surtout celles qui mesurent 1m72, « parce que c’est ma taille » et qui ont des allures de bourgeoises « parce qu’elles s’habillent mieux que les autres ».

 

 

Le jardin du Luxembourg, c’est pour les vieux !

A 21 ans, le jeune Arménien réfugié avec sa famille en Egypte devait partir aux Etats-Unis. Il fait un stop en France et n’en repartira plus hébergé par une amie qui lui confie les clefs de son hôtel particulier avenue Montaigne. Mais « comme l’argent ça se dépense vite », il va sonner à la porte de la rédaction du journal La Bataille pour proposer ses dessins. On l’embauche. En 1959 viendra la rencontre avec Marcel Dassault qui a un coup de coeur pour le dessinateur.

La parisienne ? Moi je trouvais ce nom ringard !

Ensemble ils inventent la parisienne, une fille sensuelle, aux jambes interminables et sans complexe. « C’est Dassault qui a eu l’idée de ce nom. Moi je trouvais ça ringard ! Parce qu’à l’époque, c’était le nom des épiceries ou des boutiques bon marché. Mais lui avait du pif » ! Ainsi naquit la parisienne. Sauf que des dessins sans textes, ça ne marchait pas. Alors Kiraz inventa aussi le ton Kiraz. Drôle et féroce. « On m’a un peu inspiré » s’amuse-t-il à lancer avant de préciser en riant « tout est inventé… ou presque ! ».

 

Les filles ? Il n’y a que ça dans la vie !

Marcel Dassault voulait toujours voir ses dessins le premier. Il raconte qu’une fois il fit même patienter Jacques Chirac, alors maire de Paris, parce que Kiraz arrivait avec ses nouveaux dessins en main ! « C’était mes meilleures années. J’aimais travailler avec lui. Il a eu tort de mourir ! « . Emouvant et très drôle, l’homme a gardé sa verve. Lui qui avoue en avoir eu assez des années où les gens l’appelaient « le dessinateur de Canderel » n’a jamais eu conscience qu’il inventait un mythe parce que tout simplement   » les femmes je les voyais comme ça. Les parisiennes ont toujours été belles, mais maintenant elles ressemblent vraiment à mes dessins ! »